« Du poil de la bête » :
fascinantes métamorphoses
Un titre à faire peur, à hérisser notre poil d’humain. Cette peur ancestrale, chevillée à son corollaire, l’instinct de survie, la peur d’être mangé, d’être la proie de l’autre. Une chorégraphie épique et sonore, portée par des comédiens/conteurs rois de la métamorphose, pour cette nouvelle création de la Compagnie de la Commune, donnée trop confidentiellement pour un public scolaire, lundi et mardi au centre Culturel.
UNE BOITE NOIRE : sol noir parsemé d’énigmatiques empreintes blanches, strict rideau noir clos d’une fermeture Éclair.
Pas de décor. Une comédienne, un comédien, une contrebassiste/comédienne. Sortes de scientifiques habillés d’une neutre blouse blanche, masquant leur humanité. Un épurement maximum.
C’est sévère, sérieux, quasi scolaire (c’est une création jeune public !). Même le propos introductif qui rappelle l’énigme du Sphynx. Tout le monde connaît. Qui marche à quatre pattes à midi et à trois pattes le soir ? Pas pour longtemps ! Arrive « le primate de premier rang, pouce préhenseur, famille des homicides Laurent Outan », « poils de cinquante centimètres sous les bras », d’où l’expression « poilu comme un singe ». S’ensuit, pendant une heure, un ballet foisonnant et drôle : du singe à l’huître, en passant par le crabe, le serpent, le crapaud, la mouette etc …, quatorze au total.
Convoquer l’animalité enfouie dans l’humain
Animaux campés par les métamorphoses de ces blanc/neutre comédiens, repérés par l’évidence de leur gestuelle, de leurs mimiques (incroyable crapaud), leur cri (inimitable mouette). Les mutations s’opèrent, quasi aléatoires, au passage près d’un objet/symbole (au singe la noix de coco, à la vache le carré d’herbe), déclenchées par un nom (crapaud, mouche, baleine), soulignées par une note de contrebasse faisant naître le chant de la baleine.
Une sorte de ronde poétique s’instaure, convoquant l’animalité enfouie dans l’humain, faisant évidence de notre faculté intuitive à retrouver ces sensations premières : se défendre, attaquer, et pourtant dépendre de l’autre. Pour peu que l’on accepte d’abolir les distances, d’accueillir le message en enfant. « L’homme est donc un animal, ni plus ni moins. » À une différence près cependant : il reste le prédateur ultime celui qui « a toujours le moyen de se venger. »
JMJ